Cela faisait donc plusieurs jours que les attentats avaient eut lieux. Je me souviens encore le souffle de l'explosion au cinéma, les bris de verre me déchirant la peau alors que j'avais plongé sur Abigail pour la protéger. S'en était suivit quelque chose d'encore plus... Imprévu. On m'avait tiré dessus, quelqu'un dans la foule m'avait prit pour cible. Quelqu'un, qui n'avait apparemment, pas été plus surprit que ça par la détonation. Quelqu'un que... Je connaissais. C'est du moins ce que j'avais cru. Je ne l'avais aperçu qu'un instant, juste ce qu'il faut pour imaginer que j'avais bien vu qui je voulais voir. Higins. Mon supérieur à l'armée, en Afghanistan. Celui qui faisait du trafic d'armes via un marché noir, celui qui m'avait proposé d'y participer quand je l'avais découvert. Sauf qu'à l'époque, je trouvais ça moralement incorrect. On était là pour ramener la paix, pour se battre. Pas pour s'enrichir en vendant le matériel militaire au plus offrant. Ce qui m'avait valu cet accident qui m'avait ainsi plongé dans le coma pendant deux ans.
Ainsi, j'avais cru voir Higins lors des attentats. Il serait revenu d'Afghanistan et m'aurait déjà retrouvé? Et il comptait, apparemment, terminer ce qu'il avait commencé avec moi. Bon, par chance, il ignorait que j'étais un méta, que je cicatrisais extrêmement vite. N'empêche que je l'avais aux basques. Et je vivais dans un quartier où il ne faisait pas bon à dire qu'on était autre chose qu'un humain ordinaire. Ouais, je devrais déménager. Sérieusement, je devrais foutre le camps d'ici.
Voilà donc ce que j'avais ruminé après avoir quitté le cinéma en ruines en emportant Abigail avec moi, esquivant de peu les autorités. Car ni elle ni moi n'avions envie d'être dans la liste des victimes, ni des témoins. Virant un peu parano. Ok, j'avoue, pas qu'un peu... Mais quoi? Que feriez vous à ma place? On essai de vous tuer, deux fois. L'un des essais se conclut par un coma de deux ans. Vous allez me dire que vous le vivez bien? Régénération accélérée ou pas, je m'inquiétais un peu pour ma tranquillité. J'avais donc passé mes journées à tenter de convaincre Abigail: nous trouver, ou me trouver, un lieu peinard et à l'abri des regards. Une base pour Solomon. Genre un hangar qu'on récupérerait... Après tout, elle était douée pour bidouiller sur un ordinateur. Faire disparaitre un local des fichiers ne devrait pas être si difficile que ça non? A coté de ça, car ça n'occupait pas tout mon temps. J'avais aménagé un tant soit peu mon appartement. Installation de petites charges explosives à chaque fenêtres, ainsi que sur la porte d'entrée. Si on ne désactivait pas les charges avant d'ouvrir: tout explosait. Quoi? Vous allez me dire que c'est un peu extrême comme procédé? Ouais, mais comme ça, personne n'entre chez moi sans autorisation. Sans oublier que j'avais un monte charge, menant au sous-sol et donc à mon armurerie. C'était également ma sortie de secours mais aussi mon entrée discrète. Car je ne passais plus par la porte, faisant ainsi croire à mes voisins que je ne mettais plus les pieds dehors. Allant jusqu'à me faire livrer à manger de temps en temps pour ne pas éveiller les soupçons. Higins n'était pas mon unique problème. j'avais parfois des souvenirs, très réalistes, de mes moments sur le champ de bataille, ce qui me rendait un peu... Ouais on peut le dire: nerveux. Et bon, je vivais à Upsilon. Ici, les gens épiaient leurs voisins pour balancer à l'armée si on était un méta ou non. Sérieusement, qu'est-ce que j'étais venu vivre ici?
Enfin voilà, j'étais donc chez moi, installé dans mon canapé à regarder la télévision. Mon couteau posé sur la table, mon arme à feu sous un oreiller. Sait-on jamais. On est jamais trop prudent. Je vérifiais une de mes charges explosives, m'assurant de son bon fonctionnement. Oui, on s'occupe comme on peut... Et là j'avoue que c'est un peu triste dans mon cas. Je crois qu'il était grand temps de sortir, de bouger un peu. D'aller me défouler pour m'occuper l'esprit. On frappa alors à ma porte. Ma main fila sur la table basse, saisissant rapidement le couteau de chasse. Je me levais dans la foulée.
"Qui est là ?"
Faire genre c'est normal qu'on frappe à ma porte. Putain, je n'avais jamais de visite! Et si c'était Higins? Ou un de ses sbires? Ou alors, il m'avait envoyé l'armée en disant que j'étais un méta, juste pour me faire chier?
J'arrivais alors à la porte d'entrée. Prenant une longue inspiration. Je tentais vainement de me détendre. J'avais commandé une pizza? Me semble pas... J'appuyais sur le bouton de la bombe installée à la porte pour l'éteindre. Et oui, pas de fil à couper. En même temps c'est moi qui doit les couper ou les enclencher, par sécurité. Pas besoin de les désamorcer en jouant le démineur qui doit couper le fil bleu. Ou alors était-ce le fil rouge?
Je posais ma main sur la poignée. L'autre tenant fermement le couteau. J'entrouvris la porte, prêt à me battre, à tuer si cela me semblait nécessaire. Et là, mon visage devait exprimer une magnifique expression idiote, voir de stupéfaction. Sur le seuil de ma porte se tenait deux personnes que je connaissais. Et aucune des deux n'étaient, enfin je crois, liées à Higins ou l'armée. C'était... Le docteur Andersen, la toubib que j'avais rencontré, celle qui avait prélevé mon sang. Putain, elle était ici pour me faire chanter? Cette pensée se dissipa de suite. Car la seconde personne était Caithleen. Elle aussi je l'avais connu à l'hôpital, quand j'avais voulu faire disparaitre mon analyse de sang. Et aussi farfelu que cela puisse paraitre, on avait plutôt bien sympathisé elle et moi. Certains iront même jusqu'à dire: un peu trop même. Petit indice, je l'avais aperçu en sous-vêtements à l'hôpital quand ses collègues m'étaient tombées dessus. Et bien... Plus tard, j'en avais vu encore un peu plus que ça. Sauf que depuis: aucune nouvelle. Pas que je m'étais attendu à un truc sérieux, même si j'aurai bien aimé car ma vie était un peu trop basée sur la solitude.
Mon cerveau tourna rapidement pour analyser les choses. Elles me voulaient quelques chose, j'ignorais quoi. Mais une femme ailée, sur le palier d'une porte à Upsilon, c'était surtout la promesse à pas mal de problèmes. J'ouvris en grand la porte, leur faisant signe de tête d'entrer.
"A l'intérieur. Tout de suite."
A peine avaient-elles franchit la porte que je la claquais et que j'enclenchais de nouveau l’explosif. Je me tournais vers les deux femmes, un peu intrigué. J'étais content de voir Cait, même si je ne savais pas trop comment agir vis à vis d'elle. C'était sympa de la voir, j'étais soulagé de voir qu'elle allait bien malgré les attentats. J'avais envie de lui dire que ça me faisait plaisir mais... Était-ce le moment? Quand à sa collègue, Sigrùn je crois, elle avait une mine affreuse. Le genre de tête de quelqu'un qui a mal dormi et qui a des emmerdes.
"Heureux de te revoir Cait. Tu vas bien depuis la dernière fois? Je lui fis un sourire. Au point où la situation était étrange, autant dire ce qu'il me passe par la tête plutôt que de cogiter pour rien. Et donc mesdames, que me voulez-vous? C'est genre parce que, une fois encore, j'ai loupé mon rendez vous à l'hôpital?"
Je glissais lentement le couteau de chasse dans mon dos, le coinçant dans mon pantalon, évitant de faire un geste brusque pour qu'elles ne le remarquent. Inutile de les inquièter comme quoi je suis armé ou sur les nerfs... Cait devait encore hésiter à donner un avis sur mon sujet. J'imagine qu'elle hésitait entre: mec dangereux et un peu psychopathe ou mec mignon un peu loufoque mais sympa. Faites qu'elle penche pour la seconde option... Merde c'pas le moment d'espérer la pécho une seconde fois. Ou alors... Non? Elles voulaient un truc à trois? Nan Derek, calme toi, c'est impossible. En plus, l'emplumée semble au bord de la crise de nerfs. C'est plus sérieux que ça... Voulaient-elles voir Solomon? Nan, impossible, elles n'avaient surement aucune idée de qui c'est et encore moins de chance de remonter jusqu'à moi.