Alors nous sèmerons les graines du
Chaos
"Pose ton arme ! Pose la !"
Les vociférations de la police me font tressaillir. A Beta, je suis chez moi : c'est mon quartier. Je les connais de rondes passées - comme je connais tous les policiers ayant le malheur d'être affectés ici pendant leur formation - mais il est fort probable qu'ils ne me reconnaissent pas. Pourtant, peu importe les raisons qui m'avaient menées ici, je réalise que je me suis plongé dans un merdier inextricable face auquel la seule issue possible était la violence...
Mais revenons en arrière.
Avant cette situation merdique.
Avant les flingues braqués sur moi, il y avait cette pauvre loque...
Rickert
J'avais déjà croisé ce nouveau méta déclaré, chien fidèle à la loi de Turene, dans le quartier pauvre de Primo à Beta. Sa mutation soudaine rendait bien évidemment impossible toute tentative de dissimulation face aux autorités : son corps était devenu métallique, mais lui permettait tout de même de se mouvoir. Pourquoi la nature avait doté un être aussi insignifiant et faible d'un tel pouvoir ? Comme une puberté soudaine, il ne semblait pas véritablement accepter sa nouvelle nature. Ce constat me rappelait que même si les méta-humains étaient des élus voués à surpasser les autres créatures de la Terre, tous ne s'étaient pas vus offrir un pouvoir à l'image de leur personnalité. ..
Malheureusement pour Rickert, la police de LibertyTown n'était pas toujours tendre avec les méta-humains. Bien au contraire. Depuis une semaine, deux affaires de violences policières venaient déjà d'entacher les premiers mois de mise en place de la Loi. En l'occurrence, même si l'homme était constitué d'un métal particulièrement solide, les coups pleuvaient sur lui alors que les agents tentaient de le "maitriser" - l'homme pourtant à terre et immobile - à coups de matraques. "Insupportable..." Alors que les portables sont braqués sur lui, je me recule, assez loin pour pouvoir laisser le pouvoir de mes flammes m'envahir, et cacher mon visage sous des flammes inextinguibles. Mon gant enflamme la machette que je sors de mon pantalon, laissant quelques badauds découvrant ma forme monstrueuse fuir ou s'effondrer de terreur. Je m'approche lentement de la scène, les portables braqués désormais sur moi. Deux personnes s'effondrent, trois s'enfuient, réduisant les spectateurs aux quelques figures observant la scène de loin, les deux policiers, et deux voitures bloquées par l'incident.
- C'est quoi ce ... putain... lance un des agents de police. Le second recule, braquant désormais son arme sur moi. Rickert détale, allant s'écraser comme une merde sur le trottoir et s'enfuir dans l'obscurité d'une ruelle.
- Fils de pute. Dis-je les dents serrés, réalisant que je venais de faire une connerie monumentale. Peut être que tous les métas ne méritaient pas de survivre à la fin du monde ?
- Les gars...
- Poste ta machette !
- Qu'est ce qu'on dit déjà ?
- On t'a dit de poser ta machette, tout de suite !
- Fuck the Police ?
Alors que mon sang bouillonne, je tape du pied sur le sol et laisse le pouvoir de mon "maître" s'y investir peu à peu. Dans une mouvance de plus en plus perceptible, les fissures apparaissent, laissant des sillons de flamme y naître.
- Dernière sommation, pose ton arme !
Je ne bouge pas. Saisit par l'excitation naissante, la peur de la mort qui ne m'effrayait plus vraiment... Je lève finalement doucement les mains.
Tue les, tous, tous autant qu'ils sont. N'en laisse vivre aucun. Aucun ne mérite de s'en sortir. Tous, tous doivent mourir. Tous devront périr. Oui. Vas y. Tu le veux. Fais le. Maintenant. Enfin ! Laisse la bête sortir. Laisse la...
- Ta gueule. J'ai compris. Je souris, laissant une flamme traverser lentement ma jambe et investir le sol...
BOOOOOOOOOOOOOOM
Une détonation violente surprend les spectateurs concentrés à capturer la scène avec leurs smartphone. L'explosion transforme l'espace urbain en véritable enfer. Les cris, la stupeur, les larmes. Le chaos venait de naître alors que mon visage s'était transformé. Ma chaire entièrement effacée au profit du Roi des Cendres, le dieu infernal : il ne restait plus qu'à laisser s'étendre sur eux mon pouvoir de destruction.
Aucune victime, pour le moment, mais de nombreux blessés. L'une des voiture s'est vue retournée par le souffle et a pris feu : on est pas dans un putain de film américain, elle n'allait pas exploser. Je suis pris d'un doute : allais-je tuer des innocents ? Vraiment ? Je n'avais tué que des camés et autres fils de putes inutiles au monde. Mais des passants ? Je suis pris par le doute. Et les flics ? Les tuer me ferait franchir un cap. Je pouvais encore fuir. Profiter du trouble pour que tout soit un simple mauvais souvenir. Mais une silhouette semblait émerger du groupe de spectateurs. Sérieusement ? Un autre flic ? Un héros providentiel ?
Si des clients voulaient un aller simple vers les sept cercles, alors j'étais ravi de leur offrir une mort rapide, expéditive.
Je pourrais toujours dire qu'il s'agissait de légitime défense, non ?